dimanche 28 juin 2015

Petite annonce

Orchestre bien trop rural, voire même : bien trop forain, cherche technicien de région expert en la matière pour conseils avisés et/ou soutien substantiel.

mardi 23 juin 2015

Le Douanier arrive en station tropicale #1

Les jongles.
A l'époque on disait jongles.
Il s'agissait bien évidemment de jungles, mais elles semblaient à ce point lointaines et sauvages qu'on préférait les désigner sous ce terme-là, jongles.
Rares étaient ceux qui les visitaient et plus rares encore ceux qui en revenaient. 
Et parmi ceux qui revenaient, combien étaient sains d'esprit ?

On les peignait pourtant idylliques comme le Douanier Rousseau. On pouvait y rencontrer un tigre monté par un joueur de ukulele. Un tigre souriant presque et prêt à jouer avec n'importe quoi, avec n'importe qui, parmi d'immenses fleurs dont on n'osait pas rêver. 
Comme si, enfin, le monde respirait en ce dimanche tropical.
Il y avait plus loin de belles femmes. Nues pour certaines, vêtues de blanc colonial pour d'autres, des femmes resplendissantes de santé et en harmonie totale avec la nature. Il y avait d'exubérantes végétations, des lianes improbables, des variétés insoupçonnées d'araignées monstres et, caché dans les taillis, toujours, l'une ou l'autre de ces bestioles avec des dents décourageantes et des yeux brillants. 
Il arrivait aussi qu'on s'enroule dans de grandes fougères. Qu'on se frotte subitement contre les troncs immenses d'arbres inconnus en grognant comme un ours. On faisait ce genre de choses. Cela n'était pas mal vu. Et si par bonheur le rythme du boogaloo venait à se faire entendre, il pénétrait tous les tissus du corps et, par l'épiderme, s'infiltrait jusqu'aux os afin qu'ils s'entrechoquent dans le sabbat frénétique d'une pulsation vaudou.


C'était le bon temps des jongles. Jongles fantasques et fantasmées, poussées dans l'esprit d'un promeneur parisien. Car Henri Rousseau n'a jamais visité les Tropiques. Il les a réinventées, paraît-il, au cours de promenades dans le jardin des Plantes. Et sans jardin ni plantes nous faisons pourtant de même, profitant des vastes décors que ce monsieur-là a plantés pour nous sur la toile de ses tableaux.

Nos Tropiques sont nées au creux des vôtres, Monsieur Rousseau, et comme les vôtres elles sont plus rêvées que nature.